Dans les réunions auxquelles je participe, tout le monde attend que je paye pour les boissons et les arachides. Pendant les réunions d’ATEDD, c’est le consortium de gestion de la subvention qui prenait en charge. J’ai hésité sur l’attitude à tenir puisque je tiens à faire comprendre que je ne suis pas un bailleur de fonds. J’ai finalement décidé de payer mais en donnant à ce geste un sens très différent de la distribution d’une enveloppe, un sens de solidarité, d’économie humaine.
Pour me faire comprendre, j’ai joint le geste à la parole.
A la fin d’une de mes interventions, j’ai dit : « J’ai soif, mais je ne vais pas boire tout seul alors que vous avez soif vous aussi. J’offre à boire à tout le monde ». Et j’ai sorti le billet de ma poche pour le confier à quelqu’un qui est parti faire les achats. J’ai expliqué : « C’est moi qui paye parce que j’ai beaucoup plus de moyens que vous. Je touche une pension confortable grâce au système français de retraite pour lequel j’ai cotisé toute ma vie ». Et d’ajouter : « C’est aussi cela l’économie humaine, c’est une société où chacun donne selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ». Formule qu’il faut expliquer en français et en swahili.
Je précise même : « où les riches donnent beaucoup et les pauvres un peu, mais un peu quand même. Car la dignité, c’est donner et recevoir. Les systèmes d’épargne et les mutuelles qui sont très répandues ici fonctionnent d’ailleurs grâce au grand nombre de personnes qui versent une petite cotisation, mais régulièrement.»
A la fin de la réunion, les bouteilles sont distribuées et chacun la tient à la main pour la photo de famille.
On m’avait demandé de parler d’économie humaine. Je crois que j’ai répondu à la commande d’une façon que tout le monde a pu comprendre.
Michel Tissier